Le récit communément désigné « Les dix plaies d’Egypte » est assez mal connu. Si, si, je t’assure. D’abord parce que nous ne l’entendons pas (ou plus) à la messe, et il ne s’y trouve donc ni commenté ni expliqué (à moins que cela m’ait échappé toutes ces années). De plus, tu ne trouveras guère de grandes méditations spirituelles sur cette aventure, la plupart des commentaires des pères de l’Eglise dont nous disposons passant généralement assez rapidement dessus. En outre, les exégètes s’intéressent assez peu à ce texte, sinon au plan de l’histoire de la rédaction, ou de l’histoire tout court. En fait, dans ce domaine, le récit a surtout passionné ceux qui cherchaient la trace de grandes catastrophes naturelles dans l’histoire de l’Egypte ancienne, comme on le fit d’ailleurs pour le récit du déluge. Et finalement, il n’aura eu vraiment d’intérêt, à notre époque, que pour les producteurs hollywoodiens : c’est qu’Hollywood aime les grandes batailles, les combats épiques, et en la matière, ce récit est un modèle du genre dans la Bible.
Voilà pourtant un texte qui n’est pas pour passer inaperçu aux yeux du lecteur attentif de la Bible, puisqu’il n’occupe pas moins de cinq chapitres entiers du livre de l’Exode (7 à 11 inclus). Sa lecture attentive ne peut donc pas être dénuée d’intérêt. En outre, elle ne peut qu’aider à sortir des représentations populaires désormais imposées par le cinéma. C’est pourquoi, laissant les questions historiques – est-ce que ça s’est vraiment passé ou pas, si oui comment, etc – je voudrais maintenant me pencher, et t’inviter à le faire avec moi, sur ce long récit, tel qu’il nous est rapporté dans la Bible 1.
Avant de commencer, il y a une étape préalable à la lecture, moins glamour mais nécessaire, qui est de s’accorder sur le commencement et la fin du texte que nous allons lire. Et déjà, la première difficulté, c’est bien de savoir où va commencer notre texte. Les différents plans du livre de l’Exode proposés par les éditions de nos bibles, comme par les grands commentaires exégétiques, ne permettent pas de dégager de réel consensus, la difficulté consistant à savoir si le début du chapitre 7 appartient bien au récit ou plutôt à ce qui précède. De fait, ils constituent une transition que l’on peine à dissocier de l’avant comme de l’après : les vv. 1-6 sont de toute évidence un résumé, en forme d’annonce, de tout ce qui va suivre jusqu’au chapitre 11. Mais ils concluent aussi, à leur façon, le récit de la vocation de Moïse commencé en Ex 3,1, le verset d’Ex 7,7 en particulier, résonnant comme une conclusion 2 : « Et Moïse avait 80 ans et Aaron avait 83 ans en parlant (eux) à Pharaon« . C’est d’ailleurs pourquoi la plupart des plans proposés aujourd’hui rattachent Ex 7,1-7 à ce qui précède, pour faire débuter la section dites des « dix plaies » en Ex 7,8 3. Ce ne sera pourtant pas mon choix, si tu veux bien, et je vais bien sûr m’en expliquer.
Prenons d’abord les choses sous un autre angle, en partant de la fin de la section. Contrairement au début, il serait inutile de justifier trop longuement combien le début du chapitre 12 procède d’une rupture narrative avec ce qui précède, et délimite clairement le texte. Le fait est que le récit d’institution du rite de la Pâque, qui commence avec le chapitre 12, relève d’un tout autre genre littéraire que celui de la narration des cinq chapitres précédents. Nous pouvons déjà dire que notre texte n’ira pas plus loin que la fin du chapitre 11. Et c’est donc à la fin de ce chapitre 11 qu’il faut nous intéresser : très vite, nous pouvons remarquer qu’elle nous renseigne assez bien, par de nombreux parallélismes, sur le commencement du texte qu’elle conclut.
7:1 Et il dit, YHVH, à Moïse : je t’ai donné (d’être) un dieu pour Pharaon et Aaron ton frère sera ton prophète. 2 Toi, tu parleras selon tout ce que je t’ai ordonné, et Aaron ton frère parlera à Pharaon, et il renverra les fils d’Israël de sa terre. 3 Moi, j’endurcirai le cœur de Pharaon et je multiplierai mes signes et mes prodiges dans la terre de Mitsraïm[ 4 ]. 4 Il n’écoutera pas vous, Pharaon, et je donnerai ma main en Mitsraïm, et je ferai sortir mes armées, mon peuple, les fils d’Israël, de la terre de Mitsraïm, dans de grands jugements. 5 Et ils sauront les Mitsraïm que moi (je suis) YHVH quand j’étendrai ma main sur Mitsraïm et que je ferai sortir les fils d’Israël du milieu d’eux. 6 Et il agit, Moïse et Aaron, comme l’avait ordonné YHVH à eux, ainsi ils agirent.
11:6 Et il y aura une clameur grande dans toute la terre de Mitsraïm, que pareille il ne fut pas fait, et pareille il ne continuera pas [ 5 ]. 7 Et pour tous les fils d’Israël, il ne pointera pas un chien sa langue contre un homme et jusqu’à un animal, afin que vous sachiez qu’il met à part, YHVH, les fils de Mitsraïm et les fils d’Israël. 8 Et ils descendront, tous tes serviteurs que voici, vers moi, et ils se prosterneront devant moi pour dire : Sors, toi et tout le peuple qui est à tes pieds, et après ainsi, je sortirai. Et il sortit dans une chaleur de narine [ 6 ]. 9 Et il dit, YHVH, à Moïse : Il n’écoutera pas vous, Pharaon, afin de multiplier mes prodiges dans la terre de Mitsraïm. 10 Et Moïse et Aaron, ils agirent tous les prodiges que voici à la face de Pharaon. Et il renforça, YHVH, le cœur de Pharaon, et il ne renvoya pas les fils d’Israël de Mitsraïm.
Comme on peut le voir, les parallèles entre les deux passages sont parfois très littéraux (comme avec la reprise du terme « prodiges »), et parfois simplement des échos (Ex 7,5 / Ex 11,7). En outre, on peut voir un parallèle entre les grands jugements annoncés en Ex 7,4 et la grande clameur annoncée en Ex 11,6. Alors, le début du chapitre 7 : introduction ou conclusion ? Je propose ici de dire que le v. 7 – Et Moïse avait 80 ans et Aaron avait 83 ans en parlant (eux) à Pharaon. – a bien tous les traits d’un sommaire conclusif, rappelant comme en écho, la généalogie d’Ex 6,14-26 ; mais aussi de remarquer que cette conclusion peut tout aussi bien être celle de la sous-section des vv. 7,1-7. Nous prendrons donc, si tu veux bien, plutôt le parti de la toute récente traduction française liturgique de la Bible, dont le plan intègre Ex 7,1-7 comme introduction de la section allant des chapitres 7 à 11 (inclus). Et plus exactement, comme cette nouvelle traduction liturgique de la Bible fait débuter sa section au v. 6,28, nous ferons de même, observant que le v. 6,28 a une ressemblance non négligeable avec v. 12,1 ; cette ressemblance étant celle de ce qui paraît bien être, dans un cas comme dans l’autre, un nouveau chapitre du récit :
6:28 Et il y eut un jour où il a parlé, YHVH, à Moïse en terre des Mitsraïm. 29 Et il parla, YHVH, à Moïse, pour dire : Moi (je suis) YHVH. Parle à Pharaon roi de Mitsraïm, tout ce que moi, je parle à toi. 30 Et il dit, Moïse, à la face de YHVH : Vois, moi (je suis) incirconcis des lèvres ! Comment il écoutera moi, Pharaon ?
12:1 Et il dit, YHVH, à Moïse et Aaron, en terre de Mitsraïm, pour dire :
L’établissement nécessaire de ces contours étant derrière nous, nous avons maintenant l’opportunité de relire l’ensemble du texte qui va d’Ex 6,28 à 11,10, et de bien s’en imprégner. Si ce n’est pas déjà fait, vas-y, fais-toi plaisir, c’est le moment. Après, je vais spoiler à fond !
A la lecture, tu remarqueras tout de suite de nombreuses répétitions, comme des refrains rythmant le récit. Mais surtout, la première chose qui devrait te questionner, c’est que le concept de « dix plaies » n’est pas très explicite dans ce texte. D’abord, la notion de « plaie » n’apparaît qu’en Ex 9,14, avec le terme מַגֵּפָה (maggéphah), et au verset suivant avec son synonyme דֶּבֶר (dèvèr). On retrouve un troisième synonyme du mot « plaie » à la fin du récit, en Ex 11,1, le mot נֶגַע (nèga’). Le terme de « prodige » est quant à lui employé 4 fois dans la section (7,3.9 ; 11,9.10) 7. Il faut remarquer toutefois que la notion de « plaie » en 9,14 est au pluriel et semble inaugurer une nouvelle série, autant qu’elle implique un précédent : « Car cette fois-ci, moi j’envoie toutes mes plaies vers ton cœur » (Ex 9,14). Le « cette fois-ci » implique en effet des « plaies » précédentes ayant pu être envoyées, mais non dirigées directement vers le cœur de Pharaon. Le verset semble en outre indiquer que ce qui va suivre ne va pas se limiter à une seule plaie (le pluriel étant employé). De même, en 11,1, le terme que je traduirais plus volontiers par « blessure », pour le distinguer de ses deux synonymes précédents, suppose un précédent : « Encore une blessure, une seule » (Ex 11,1) indiquant la conclusion d’une série.
Enfin, il va de soi, quant on fait la lecture des prodiges réalisés par YHVH, via Moïse et Aaron, que de l’eau changée en sang aux ténèbres, en passant par l’invasion de grenouilles, de moustiques, de taons, par la mort du bétail, l’ulcère, la grêle, et l’infestation de sauterelles, que les prodiges en question ont bien toutes les caractéristiques de fléaux.
Le problème, c’est qu’au plan de la structure du texte, si on réduit ces prodiges à des fléaux ou des plaies, on est obligé d’exclure de la liste le premier des prodiges de la liste : le bâton changé en dragon 8. Et donc, d’amputer indûment le texte. Et même si l’on considère, comme c’est généralement le cas dans les commentaires, ce premier prodige comme une « introduction » à ce qui va suivre, alors on sera bien plus avisé à considérer d’abord ce qui suit comme une série de prodiges que comme une série de plaies, ce premier « geste divin » étant explicitement donné en réponse à une demande de « prodige » (cf. Ex 7,9).
En outre, en regardant attentivement le texte, il te sera difficile, en respectant le rythme qu’il impose, d’en compter précisément 10 9. Il semble que ce nombre de 10 apparaisse pour la première fois dans le livre des Jubilés 10. En effet, tu auras sans doute remarqué que le texte est ponctué de refrains. Tout d’abord, chaque épisode de la saga est introduit par la formule : וַיֹּאמֶר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה (vayyomèr YHVH èl-moshèh) : « Et il dit, YHVH, à Moïse ». Cette formule n’est pas exclusive des débuts de chaque épisode prodigieux, puisqu’elle apparaît parfois plusieurs fois au cour du récit d’un même épisode. Mais elle permet néanmoins clairement d’en délimiter les débuts. En outre, une limite beaucoup plus nette est formée, en fin de chaque épisode, par le refrain qui concerne l’endurcissement du cœur de Pharaon. Ce refrain connait des variantes au long du récit :
- « Et il fut fort le cœur de Pharaon » (7,13.22 ; 8,15) ;
- « Et il rendit lourd son cœur » (8,11)
- « Et il rendit lourd, Pharaon, son cœur » (8,28) ;
- « Et il rendit lourd le cœur de Pharaon » (9,7) ;
- « Et il rendit lourd son cœur, lui et ses serviteurs, et il fut fort le cœur de Pharaon » (9,34-35) ;
- « Et il renforça, YHVH, le cœur de Pharaon » (9,12 ; 10,20.27 ; 11,10) 11
Quoiqu’il en soit de ces variantes (que j’analyserai plus tard), on constate que l’usage d’une de ces formule conclue systématiquement un épisode prodigieux, avant de laisser le récit passer au suivant, introduit par un « Et il dit, YHVH, à Moïse ». Or si on fait le compte de ces refrains, on n’en dénombre pas 10 mais 11, qui correspondent à 11 épisodes, allant du bâton changé en dragon à la mort des premiers-nés.
J’aborderai dans un prochain billet le cas du bâton changé en dragon. Mais d’ores et déjà, bien qu’il ne soit pas inclus par la tradition dans la liste des dix plaies, je tiens à le compter, eut égard à la structure du texte, parmi la série des prodiges relatés par le texte, au même titre que ceux qui suivront. Il est en effet délimité exactement comme les autres épisodes, et est d’ailleurs explicitement définit comme un « prodige » dans le texte (cf. Ex 7,9).
En revanche, pour ce qui concerne la mort des premiers-nés, traditionnellement comptée comme la dernière des dix plaies, nous constatons une spécificité, née de la rupture narrative introduite par l’institution de la Pâque au chapitre 12 : le fait que la mort des premiers-nés n’est qu’annoncée dans cette section, et non réalisée. Cette dernière blessure infligée à l’Egypte sera en réalité le déclencheur de la sortie d’Egypte, tandis que tu peux voir que la liste des prodiges narrés dans les chapitres 7 à 11 a plutôt vocation à préparer, en faisant monter la tension, cette sortie d’Egypte. Ce n’est pas le cas de la mort des premiers-nés, dont l’événement fait partie intégrante de la sortie elle-même.
Peut-on donc comptabiliser l’épisode narré au chapitre 11 dans la série des prodiges précédant la Pâque et la sortie d’Egypte ? Je préfère répondre non à cette question. De fait, le chapitre 11 est bien conclu par le refrain que nous avons déjà évoqué : « Et il renforça, YHVH, le cœur de Pharaon, et il ne renvoya pas les fils d’Israël de Mitsraïm » (11,10). Mais tu constateras qu’il fait suite à une phrase typique de conclusion, dont nous avons vu qu’elle faisait un parallèle avec le prologue : « Et Moïse et Aaron, ils agirent tous les prodiges que voici à la face de Pharaon » (11,10). Aussi bien, on peut considérer l’usage de ce refrain final comme la conclusion et la synthèse de tout ce qui vient d’être narré depuis l’annonce des prodiges. Ce refrain est comme la répétition, en finale d’un chant, du refrain repris entre chaque couplet. Il ne vient pas à proprement parler succéder à un couplet, mais conclure la chanson.
En d’autres termes, il me semble que « la mort des premiers-nés » ne constitue pas un nouvel épisode « prodigieux » de notre récit, et qu’il ne peut être comptabilisé comme tel. Le chapitre 11 est tout simplement une conclusion de la section : il lui est inséparable, mais n’ajoute pas au compte des « signes et prodiges » de YHVH en Mitsraïm. Si bien que l’énumération des « prodiges » nous amène bel et bien à un compte de dix, allant du bâton changé en dragon aux ténèbres de trois jours. Cependant, cette énumération n’est pas superposable à celle de dix plaies, qui elle ne comptera pas le bâton changé en dragon, mais comptera en revanche la mort des premiers-nés.
Si l’approche traditionnelle a plutôt privilégié la mémoire de dix plaies, c’est qu’elle a manifestement voulu opposer cet épisode de l’histoire sainte à celui qui suivra peu après, et qui en est comme son aboutissement : le don de la Torah au Sinaï, représenté en particulier par le décalogue, les dix paroles (elles-mêmes difficiles à dénombrer ainsi, en y regardant de près). Comme Dieu a donné 10 paroles (et non pas 10 « commandements ») à Israël, il a donné à Mitsraïm 10 plaies. Le parallèle ne tient d’ailleurs pas seulement à une vague énumération, mais aussi au fait que le terme דֶּבֶר (dèvèr) utilisé dans le texte (Ex 9,15), et que nous pouvons traduire par « plaie » ou « fléau », est l’homographe d’un autre mot très important, le mot דָּבָר (davar), que nous traduisons justement par « parole » (seules les voyelles changent, des voyelles qui d’ailleurs n’existent pas dans les rouleaux de la Torah). Autrement dit, il y a une analogie évidente entre ce qui est une « plaie » pour l’Egypte et ce qui est une « parole » pour Israël. Si Dieu donne à Israël ses paroles sur des tables de pierre, il les a d’abord inscrit dans sa Création – ici, avec ces grandes « catastrophes naturelles » que sont ces fléaux envoyés aux égyptiens. Et d’ailleurs, comme nous aurons l’occasion de le voir par la suite, l’analogie ne s’arrête pas au décalogue, mais nous renvoie aussi à une autre extrémité de l’histoire biblique, un autre récit en « dix paroles », qu’est celui de la Création (Gn 1) 12.
Ce parallèle avec le Décalogue établit par la tradition est évidemment très important pour entrer dans le message théologique et mystique du récit. Malgré cela, tu verras que pour ce qui va suivre, nous resterons au plus près du texte, considérant donc plutôt les dix prodiges que la traditionnelle liste des « dix plaies ». Pour le dire plus clairement, si j’ai l’intention, à la suite de ce billet, d’aborder avec toi, un à un, les épisodes de cette saga, il n’y aura pas de billet dédié à la mort des premiers-nés. Nous allons relire une histoire jalonnée de dix prodiges divins, mais en gardant toutefois en tête que si le focus est différent de celui de la tradition, il ne lui est pas antagoniste. Et d’ailleurs, nous ne saurions parcourir dignement ce texte sans garder à l’esprit qu’il a un lien avec le récit de Création, mais surtout qu’il est un pro-logue, au sens littéral, du don de la Torah à Israël, au Sinaï.
Notes:
- Cette analyse aura pour support le texte hébreu, dit « massorétique », dans sa rédaction d’ensemble telle que rapporté par la Biblia Hebraica Stuttgartensia. Les traductions du texte hébreu au français seront de mon fait, et auront pour caractéristique essentielle d’être très littérales, au plus proche de la structure du texte hébreu, en particulier dans sa syntaxe. Je ferai aussi particulièrement attention à ne jamais traduire deux mots hébreux différents, même lorsqu’ils sont synonymes, ou deux formes d’un verbe, par un même mot français. ↩
- Plus précisément, la conclusion d’Ex 7,7 semble être aussi celle de la confirmation de la mission de Moïse et Aaron devant Pharaon, malgré un premier échec de cette mission. Or en rappelant l’âge de Moïse et d’Aaron au commencement de leur ministère, le verset fait inclusion avec la généalogie énoncée en Ex 6,14-26. ↩
- Voir par exemple le plan de la Bible de Jérusalem (1998), comme celui de la TOB (2010). C’est aussi le cas du commentaire de J. I. Durham, Exodus, WBC vol. 3, éd. Word Inc, 1998, et de celui de William H. C. Propp, Exodus 1-18, AYB vol. 2, éd. Yale University Press, 2010, qui font tous deux commencer la section en Ex 7,8. ↩
- « Mitsraïm » est un nom propre, désignant indifféremment l’Egypte ou les égyptiens. ↩
- i.e. « telle qu’il n’y en a jamais eu jamais de pareille, et telle qu’il n’y en aura jamais plus ». ↩
- i.e. « en colère ». C’est Moïse qui sort en colère, mais l’ambiguïté laisse volontairement le lecteur le confondre, autant dans sa colère que dans son discours, avec YHVH qui parle à travers lui. ↩
- A titre indicatif, c’est encore le terme qui introduit l’énumération des « plaies » faite par le Ps 78, en Ps 78,43. ↩
- Je reviendrai plus tard sur l’explication du terme « dragon » employé ici. ↩
- Cf. W. H. C. Propp, Exodus 1-18, p. 317 : « Just as it is surprisingly difficult to enumerate the twelve tribes of Israel or to list the Ten Commandments, so it is unclear how to count the Plagues of Egypt ↩
- En Jub 48,7. Cf. W. H. C. Propp, ibid. ↩
- La différence entre cette forme que je traduis par « Et il renforça » et celle que nous traduisons par « Et il fut fort » en 7,13.22 ; 8,15 et 9,35 tient à l’emploi pour le même verbe חזק d’un Piel dans le premier cas (« Et il renforça »), et d’un Qal dans le second (« Et il fut fort »). En outre, dans le premier cas, le sujet du verbe est clairement identifié comme étant YHVH, tandis que dans le second cas, c’est le « cœur de Pharaon » qui est sujet du verbe. ↩
- Gn 1 est également interprété en relation avec le don de la Torah (Ex 20), en particulier dans la tradition juive : en effet, par 10 fois on trouve la formule « Et Dieu dit… », ce qui en fait proprement un « décalogue ». ↩
Merci pour cette mise en bouche!
Il est vrai que déjà depuis le 13é-15é siècle au moins, des parallélismes étaient faits entre les 10 commandements et les 10 plaies d’Egypte. (cf la « Table des 10 commandements » illustration dans les psautiers et autres manuscrits type Verger de Soulas contenant le Speculum Theologiae).
Le lien avec les paroles de la Genèse est beau, et très bien vu. C’est un peu comme s’il y avait une sorte de force immanente à l’intérieur même de la Création, reflétée en notre propre coeur (d’où les 10 commandements) mais qui, ignorée amène le malhuer (cf Dt 30,19).
Autrement dit : si on choisit d’ignorer les דָּבָר (davar), paroles, il ne faut pas s’étonner de se retrouver avec les דֶּבֶר (dèvèr), plaies.
Ce qui rejoint à la fois les réponses de Chesterton et mère Theresa sur la responsabilité et conversion personnelle face au mal dans le monde, et l’encyclique du Pape, que je vais acheter au plus vite pour travailler dessus.
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Effectivement le lien entre les 10 Paroles de la création, les 10 plaies d’Egypte et les 10 commandements est très intéressant. Très présent chez nos frères juifs.
Création – décréation – recréation
Les 10 plaies sont là pour montrer à Pharaon mais aussi au peuple élu que Dieu est maître de la création et qu’il a tout créé. C’est en négatif (comme dans une photo) ce que le récit de la création proclame et chante.
Et les 10 commandements sont l’attestation de la libération de l’esclavage (dé-création) que Dieu a opérée par Moïse. C’est la recréation de l’humanité libérée (devoirs de l’homme) et la base de la communauté humaine (droits de l’homme).